Une partie de la littérature dédiée aux techniques de vente s’attache à promouvoir une présentation de l’offre de produits ou de services tournée vers le client, vers ses besoins.
Nous avons appris à créer des pitchs s’articulant autour de la valeur apportée plutôt que de l’histoire du fournisseur, de sa taille ou de ses faits d’arme. Nous avons compris comment se faire entendre de nos clients et prospects. Dans un monde aux contours incertains, nous avons redoublé d’efforts pour attirer l’attention de nos interlocuteurs. Plus rarement nous demandons-nous si notre communication s’adresse au « bon cerveau ».
Le cerveau humain est organisé en 3 parties formant un tout:
- Le cerveau reptilien est le centre de notre instinct, de nos comportements primaires (instinct de survie et de préservation) et assure nos besoins moteurs fondamentaux. Il est impliqué dans un nombre restreint de fonctions cognitives telles que l’attention, la peur ou la perspective de la récompense ou de fonctions vitales. Les réponses du cerveau sont binaires, immédiates et comparables à celles prises dans un contexte identique.
- Le cerveau paleo-mammalien, ou cerveau limbique, est le centre des émotions, de la mémoire à long terme. Faisant partie du processus de décision, il contrôle et valide les choix raisonnés provenant du cortex en y associant les dynamiques de motivation, de satisfaction, de souvenirs de réussite ou d’échecs.
- Le cerveau néo-mammalien, ou néocortex, est le centre du raisonnement, de la compréhension, de la logique et de la conscience. Il s’occupe de traiter les données rationnelles et de partager ses conclusions avec les deux autres cerveaux.
Toute situation nouvelle est prise en charge par le cerveau reptilien. Sa première réaction est de se demander si elle implique un danger, si il y a lieu de se battre ou de fuir. Si il ne perçoit pas de menace spécifique, il se met dans un état de demi-sommeil à moins, ici est le point critique, que sa curiosité ne soit aiguisée, et ce d’autant plus si elle est associée à la perspective d’une récompense.
Le cerveau reptilien est au coeur de la démarche d’achat, pour autant qu’il soit intéressé. Pour y arriver, 7 techniques peuvent être utilisées:
- Parler au prospect des difficultés qu’il rencontre. Si on a vu précédemment que le cerveau reptilien est sensible à la notion de plaisir, il est encore plus motivé par la volonté d’éviter douleur et inconfort. De nombreuses méthodes de vente mettent en avant ce point: rien ne sert de pitcher avant d’avoir identifié le ou les points de douleur les plus criants,
- Le cerveau reptilien étant responsable de la survie, son sujet favori est lui-même. Quitte à répéter la même chose encore et encore, c’est notre capacité à parler à notre client de ses problèmes, de son quotidien, de ce qu’il pourrait faire pour garantir sa survie ou améliorer son quotidien qui sera déterminant dans sa volonté de travailler avec vous,
- Le cerveau reptilien n’est pas le champion de la subtilité. Son mode de décision binaire signifie aussi que l’information dont on le nourrit doit être claire et inéquivoque. La représentation qu’il se fait des bénéfices qu’il peut escompter doit montrer un contraste fort par rapport à la situation où il ne fait rien, ou celle où il se tourne vers un autre fournisseur,
- Le cerveau reptilien n’est pas le champion du langage. Il ne comprend que quelques mots à la fois mais, à contrario, est très sensible aux informations que lui communique le nerf optique. Son intérêt est aiguisé par des messages courts, des représentations graphiques simples, colorées, structurées et dépourvues de logique calculatoire. Pour faire simple, face une présentation couverte de bullet points et de tableaux, associée à un discours monotone et compliqué, le cerveau reptilien considèrera le fuite comme la meilleure option, et l’endormissement comme alternative,
- Parce que son objectif principal est la survie, parce que il se doit de rester alerte et conscient de son environnement au sens large, le cerveau reptilien évite de fixer trop longtemps son attention sur un même point. Face à un discours, il sera attentif au début et à la fin mais portera peu d’intérêt à tout ce qui est entre ces deux marqueurs. Vous l’avez vécu des dizaines de fois: à partir du moment où vous prononcez les mots magiques de « en conclusion », tout le monde se redresse sur son siège. Pour qu’elle soit valorisée au mieux, l’information critique que vous voulez partager doit en conséquence faire partie de l’entrée en matière et être reprise lors de la conclusion en mettant l’accent sur le confort qu’apporte la solution préconisée,
- On l’a vu, le cerveau reptilien n’est pas à l’aise avec les grands discours. La même chose est vraie avec des propositions complexes et alambiquées. Pour entraîner une décision tranchée, le mieux est de garder le cerveau limbique et le néo-cortex en dehors de la discussion. La proposition se doit d’être simple, claire, imagée, qu’elle fasse comprendre ce que vous offrez, en quoi c’est le meilleur choix. L’utilisation de métaphores simples et facilement visualisables se révèle également efficace et on notera que la plupart des commerciaux et des prospects y ont recours naturellement (« je veux acheter une voiture qui me transporte d’un point A à un point B et pour cela, je n’ai pas besoin de la Rolls que vous me proposez »),
- Le cerveau reptilien est enfin sensible aux émotions, plus encore celles qui sont négatives parce qu’elles augmentent son niveau d’alerte. Pour autant qu’elles aident le prospect à mesurer les bénéfices qu’on lui soumet, les images portant un côté émotionnel fort sont efficaces parce qu’elles donnent au cerveau reptilien la capacité de s’identifier à une situation donnée. Terry Boyland, CEO de CPQI Group m’a un jour montré l’image qu’il utilise lors de certaines présentations commerciales. Elles montrent un crocodile, gueule grande ouverte, laissant un oiseau lui nettoyer les dents. Cette photo crée un choc. Elle constitue une très bonne ouverture pour aborder les thèmes de danger mais aussi de collaboration, de partenariat. Ce qu’elle fait surtout, c’est qu’elle crée une réaction qui rend les auditeurs extrêmement attentifs et concentrés. Pour l’avoir utilisée, je peux témoigner que cela marche à merveille.
En résumé, l’efficacité de toute démarche commerciale repose sur la capacité du vendeur à garder éveillé le cerveau reptilien. C’est en ciblant les points douloureux, en présentant de manière simple une offre qui soit courte, facilement compréhensible, visuellement attirante et contrastée qu’on se donne les meilleurs chances d’amadouer cet animal qui gouverne chacun de nous.
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